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RAPPORT EXPLICATIF
adopté par l'Assemblée Générale de Munich le 3 septembre 1980
A. GÉNÉRALITÉS
La présente Convention répond à des préoccupations analogues à celles qui ont inspiré la Convention sur la légitimation par mariage signée à Rome le 10 septembre 1970. Il s'agit essentiellement, afin de faciliter l'établissement de la filiation des enfants nés hors mariage, de faire en sorte que le plus grand nombre possible de reconnaissances soient considérées comme valables au plan international. Pour atteindre cet objectif, la Convention multiplie - comme l'a déjà fait la Convention relative à la légitimation ou, dans un autre domaine, la Convention de la Conférence de La Haye en matière de dispositions testamentaires - le nombre des lois qui ont vocation à régir la reconnaissance : il suffira qu'une reconnaissance soit intervenue conformément à l'une ou l'autre de ces lois pour qu'elle soit internationalement reconnue, pour qu'elle soit tenue pour valable.
Le second objectif poursuivi par la Convention est d'assurer la publicité internationale des reconnaissances en précisant les diligences que doivent accomplir à cet effet les officiers de l'état civil.
La Convention ne régit que les conditions de fond, de forme et de capacité de la reconnaissance. Elle n'a pas vocation à régir les effets de l'acte juridique de reconnaissance qui seront déterminés par la loi désignée par la règle de conflit de chacun des États contractants.
B. COMMENTAIRES DES ARTICLES
TITRE I
Le titre I groupe les dispositions de conflits de lois contenues dans la Convention. Elles répondent à son objectif essentiel qui est de faciliter l'établissement de la filiation naturelle.
Article 1er
L'article 1 précise tout d'abord, sous réserve de ce qui sera dit à propos de l'article 18, le champ d'application de la Convention : celle-ci ne régit que les reconnaissances volontaires, c'est-à-dire les actes juridiques par lesquels une personne se dit le père ou la mère d'un enfant. Il s'ensuit sous la même réserve que la Convention n'est pas applicable lorsque l'établissement de la filiation résulte d'un jugement ou du seul fait de la naissance, ou encore de l'indication du nom de la mère dans l'acte de naissance. Par reconnaissance volontaire il faut entendre les actes qui ont pour effet d'établir la filiation : la Convention ne s'applique pas aux reconnaissances qui n'auraient qu'un effet alimentaire.
L'article 1 précise ensuite les lois qui ont vocation à régir les conditions de fond ainsi que les conditions de capacité de la reconnaissance, à savoir soit la loi nationale, soit la loi de la résidence habituelle, au moment de l'acte, de l'auteur de la reconnaissance ou de l'enfant. Ainsi quatre lois sont compétentes pour régler les conditions de fond et de capacité ; il suffit qu'une reconnaissance soit intervenue conformément à l'une ou l'autre de ces quatre lois pour que son efficacité soit reconnue. Il convient de souligner que ce système n'obligera nullement, dans la majorité des cas, l'officier de l'état civil ou le juge à examiner les quatre lois applicables pour régir la reconnaissance ; le plus souvent l'une de ces quatre lois sera la sienne propre et si la reconnaissance a été faite conformément à cette loi il arrêtera là ses recherches. Ce n'est que si la reconnaissance n'est pas -ou n'a pas été- souscrite selon les normes de sa loi qu'il sera appelé à rechercher si elle peut être admise sur la base d'une des autres lois sus-indiquées.
La multiplicité des points de rattachement adoptée par la Convention se distingue d'un système qui donnerait à l'auteur de la reconnaissance le choix entre plusieurs lois ; il est apparu en effet que fréquemment un tel choix n'aurait pas été éclairé et aurait risqué d'aboutir au choix par le déclarant de la loi du lieu où la reconnaissance est souscrite, qui peut n'être qu'un lieu de résidence passager. Les conditions de capacité visent, en pratique, -sans qu'il ait paru nécessaire de préciser ce point dans le texte- la capacité de l'auteur de la reconnaissance, la "capacité", pour un enfant, d'être reconnu étant généralement classée dans les conditions de fond. Il découle notamment de la règle posée à l'article 1 que si la loi applicable permet à un mineur de souscrire une reconnaissance, celle-ci devra être considérée comme valable dans les États contractants.
Deux autres points méritent d'être soulignés :
1) La multiplicité des lois ayant vocation à s'appliquer ne permet pas de se placer sur le terrain d'une loi pour apprécier une des conditions de fond ou de capacité de la reconnaissance, sur le terrain d'une autre loi pour apprécier une autre condition. Il convient au contraire de rechercher si la reconnaissance répond entièrement aux prescriptions de l'une des lois applicables.
2) L'article 1 visant les dispositions internes des différentes lois applicables exclut, par là même, l'application des règles de droit international privé. La solution est celle qui a été adoptée dans la Convention sur la légitimation (cf. l'article 1 de cette Convention) : elle évite le retour, par le jeu du renvoi, à une loi unique qui pourrait être défavorable à la validité de la reconnaissance.
Article 2
En ce qui concerne les conditions de forme de la reconnaissance, une loi supplémentaire -celle du lieu où la reconnaissance a été faite- est ajoutée à la loi applicable en vertu de l'article 1. Cette disposition n'appelle pas de commentaires particuliers dans la mesure où elle fait application à la forme de la reconnaissance de la règle "locus regit actum". En revanche, c'est l'application aux conditions de forme des lois compétentes pour régir les conditions de fond qui constitue une innovation importante : il en résulte notamment qu'une reconnaissance sous seing privé sera valable si la loi de l'auteur de l'acte ou celle de l'enfant, ou encore la loi de leur résidence habituelle, admettent cette forme et cela même si la loi du lieu de l'acte la prohibe.
Article 3
Cet article dispose que les reconnaissances faites conformément aux dispositions des articles 1 et 2 sont reconnues de plein droit dans tous les États contractants. Il en résulte qu'aucune procédure judiciaire n'est exigée à cet effet. Cependant rien n'interdit à l'officier de l'état civil de saisir l'autorité chargée du contrôle du service de l'état civil pour lui demander son avis sur la validité de l'acte.
Article 4
Ce texte a fait l'objet d'une très longue discussion entre les partisans d'une formule générale qui aurait permis de ne pas admettre la reconnaissance en cas de contrariété manifeste avec l'ordre public du pays où elle est invoquée et les partisans d'une énumération limitative de ces cas. C'est finalement la formule limitative qui a été retenue : il est apparu en effet que le recours à une formule générale se référant à l'ordre public serait de nature à vider la Convention d'une large part de son contenu ; en outre il a semblé opportun d'obliger les États qui ne pensent pas pouvoir accorder à tous les enfants le bénéfice de la Convention, à le dire clairement.
Les dispositions de ce texte ont pour but de permettre la ratification de la Convention par les États dont la législation contient des dispositions propres à certaines catégories d'enfants ou des modalités particulières de reconnaissance. Elles ont paru d'autant plus nécessaires que la Convention est une Convention ouverte.
Il convient d'observer que toute possibilité de réserve est exclue en ce qui concerne les enfants adultérins et n'est admise que pour les enfants incestueux. Mais la Convention ménage une évolution possible puisqu'il s'agit d'une simple réserve, susceptible d'être facilement levée.
Article 5
La formulation du texte tend à éliminer l'application de l'ordre public international lorsqu'elle conduirait à tenir une reconnaissance pour nulle. Mais elle n'empêche pas de faire appel à cette notion si elle a pour conséquence d'admettre la validité de la reconnaissance.
Article 6
Certains États sont liés à d'autres par des accords prévoyant que les décisions judiciaires rendues sur le territoire de l'un d'eux seront reconnues sur le territoire d'autres États. Dès lors, en l'absence de disposition particulière dans la Convention, l'application de ces accords aurait eu pour conséquence la reconnaissance dans certains États de décisions judiciaires rendues en application d'une des réserves prévues à l'article 4 et ce, même si l'État où la décision en question est invoquée n'a pas lui-même fait cette réserve. C'est pour éviter un tel résultat que l'article 6 a été écrit : l'effet des réserves sera ainsi limité aux seuls pays qui les auront faites.
Article 7
Cet article comprend deux dispositions distinctes figurant sous deux alinéas :
L'alinéa 1 indique que la Convention ne s'applique pas lorsque la reconnaissance contredit une filiation déjà établie (reconnaissance d'un enfant légitime, reconnaissance d'un enfant naturel déjà reconnu, par exemple). Dans cette hypothèse les règles de la Convention sont écartées et chaque État appliquera son propre droit, y compris, le cas échéant, les règles de conflit qu'il contient et cela tant pour trancher le point de savoir si la filiation antérieure est vraiment établie que pour déterminer la validité ou la nullité de la reconnaissance subséquente.
L'alinéa 2 dispose que la Convention ne fait pas obstacle à ce que la reconnaissance soit contestée si l'enfant n'est pas né de celui qui l'a reconnu, c'est-à-dire si elle est mensongère. La Convention ne règle que la nullité (ou la validité) de l'acte juridique de reconnaissance et non l'action en contestation.
Article 8
Pour favoriser dans la plus large mesure possible les reconnaissances, cet article précise que les dispositions de la Convention ne mettent pas obstacle à l'application des règles en vigueur dans les États contractants qui seraient plus favorables à la validité. Sont donc admises dans l'État où elles sont invoquées les reconnaissances valables selon les règles internes et les règles de conflit de cet État, ou encore en application des Conventions internationales qu'il aura pu signer même si elles ne remplissent pas les conditions de validité prévues par l'une des lois retenues par la présente Convention. Il s'agit d'une hypothèse qui sera sans doute très rare, eu égard au libéralisme de la Convention, mais qu'il est apparu opportun de réserver.
Article 9
L'alinéa 1 de cet article précise que la Convention est applicable à l'égard des ressortissants de tous les États, même non contractants. Il en résulte que les dispositions des articles qui précèdent constituent désormais des règles uniformes de droit international privé, introduites dans la législation de chaque État contractant et applicables à toute reconnaissance. Le caractère uniforme a été expressément voulu, comme en matière de légitimation (cf. l'article 5 de la Convention sur la légitimation et son rapport explicatif I, B, 2°) afin d'éviter l'illogisme qui consiste, dans un même pays, à faire dépendre la validité d'une reconnaissance de législations différentes selon que l'enfant ou l'auteur de la reconnaissance est ou n'est pas un ressortissant de l'un des États contractants.
L'alinéa 2 permet aux États contractants d'évincer la loi de la résidence habituelle, mais uniquement lorsque cette résidence se situe hors du territoire des États contractants ou des États membres de la Commission Internationale de l'État Civil ou encore des États membres du Conseil de l'Europe. Ainsi la loi de la résidence habituelle pourra être écartée soit d'une manière radicale par application de la réserve de l'article 4, littera a, soit d'une manière plus souple et nuancée par l'application de l'article 9, alinéa 2.
TITRE II
Le titre II rassemble les dispositions à caractère technique que doivent observer les officiers de l'état civil.
Article 10
Cet article prévoit dans le dessein de donner à la Convention un maximum d'efficacité pratique, que l'autorité qui reçoit ou transcrit la reconnaissance d'un enfant envoie à l'officier de l'état civil du lieu où l'acte de naissance de cet enfant a été dressé ou transcrit un avis en vue de la mention de la reconnaissance. Cet avis est rédigé selon une forme plurilingue dont le modèle est annexé à la Convention (alinéa 2).
Articles 11 à 16
Ces articles prévoient les mentions qui doivent être apposées sur la formule annexe, les symboles qui doivent être utilisés, les langues qui doivent être employées. Ces dispositions sont directement inspirées de celles de la Convention relative à la délivrance d'extraits plurilingues d'actes de l'état civil, signée à Vienne le 8 septembre 1976.
L'article 16 précise que les avis sont dispensés de toute légalisation ou de toute formalité équivalente sur le territoire de chacun des États contractants.
Article 17
Cet article est relatif aux obligations de l'officier de l'état civil qui reçoit un avis de reconnaissance : il doit en faire mention sur ses registres, sans formalité, après avoir seulement vérifié ou fait vérifier par l'autorité dont il dépend que les conditions prévues par la Convention sont remplies.
TITRE III
Article 18
Selon la législation de certains États la filiation maternelle est établie du seul fait de la naissance ou de la désignation de la mère dans l'acte de naissance.
Il importait donc que cette Convention, qui tend à favoriser la validité internationale des reconnaissances, prévoie que, dans les États dont la législation exige une reconnaissance volontaire pour établir la filiation maternelle, l'enfant né dans un autre État d'une femme dont la loi nationale interne admet l'établissement de cette filiation sans reconnaissance soit considéré comme ayant sa filiation maternelle établie.
Tel est l'objet de l'article 18.
Article 19
Ce texte, qui est l'homologue de l'article 7, alinéa 2, permet la contestation de la filiation maternelle de l'enfant, s'il se révèle que l'indication portée à ce sujet dans l'acte de naissance est erronée.
TITRES IV et V
Le titre IV précise les conditions d'application de la Convention aux réfugiés et apatrides (article 20). Ce titre prévoit par ailleurs que la Convention ne régira que les reconnaissances souscrites postérieurement à son entrée en vigueur (article 21).
Le titre V est consacré aux différentes clauses finales.