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RAPPORT EXPLICATIF
adopté par l'Assemblée Générale à Interlaken le 12 septembre 1973
La présente Convention a pour but de réduire le nombre des cas d'apatridie.
L'article 1er pose la règle que l'enfant né d'une mère ayant la nationalité d'un État contractant acquiert la nationalité de celle-ci au cas où autrement il eût été apatride. Cette règle s'applique à la fois aux enfants légitimes et illégitimes.
Elle aura pour effet qu'un enfant qui n'emprunte pas une nationalité à son père et qui n'est pas né sur le territoire d'un pays appliquant le ius soli, acquiert à sa naissance la nationalité de sa mère. Une telle règle est déjà incorporée dans la législation de plusieurs États membres de la CIEC, mais il y en a d'autres qui hésitent à l'introduire parce qu'ils estiment que l'enfant devrait plutôt être rattaché, pour ce qui concerne la nationalité, à son père.
Néanmoins, il est apparu que ces États pourraient admettre un tel enfant comme leur ressortissant s'il est né sur le territoire d'un État contractant, ce qui garantit une certaine réciprocité. C'est pourquoi la Convention ouvre dans son article 4 a) la possibilité de limiter l'application de la règle aux enfants nés sur le territoire d'un État contractant.
Les États dont la législation est déjà conforme à l'article premier pourront contribuer à la réduction de l'apatridie en ratifiant la Convention. Par la ratification leur territoire devient territoire d'un État contractant, ce qui implique que les enfants qui y naissent pourront bénéficier de l'article premier.
Comme il a déjà été relevé, l'article premier s'applique aussi aux enfants illégitimes. Selon la législation de certains pays, la filiation maternelle de l'enfant est établie par le seul fait de la naissance, alors que dans d'autres pays cette filiation ne sera établie que si un acte juridique intervient, par exemple une reconnaissance volontaire.
L'article tient compte des deux hypothèses; dans la première, l'enfant acquiert la nationalité de sa mère à la naissance; dans l'autre, à condition qu'il soit encore mineur, le jour où la filiation maternelle produit des effets en matière de nationalité.
Par un raisonnement a contrario l'article premier pourrait peut-être conduire à la conclusion qu'un enfant ne suit plus la nationalité de sa mère s'il acquiert iure soli une nationalité à sa naissance. Un tel raisonnement serait erroné; la Convention n'a nullement pour but de porter atteinte aux règles en vigueur en vertu desquelles un enfant emprunte une nationalité à sa mère. Ceci est souligné par l'article 5.
L'article premier renferme une règle sur l'acquisition d'une nationalité soit à la naissance soit à une date ultérieure, mais ne dit rien au sujet de la conservation de cette nationalité. La Convention n'empêche donc pas un État de ne plus considérer l'enfant comme son ressortissant s'il est établi, pendant sa minorité, qu'il a acquis une nationalité étrangère.
L'article 2 dispose que, pour l'application de la Convention, l'enfant né d'un père ayant la qualité de réfugié est considéré comme ne possédant pas la nationalité de celui-ci. Il en résulte que l'enfant, légitime ou non, dont la mère est ressortissante d'un État contractant et le père reconnu comme réfugié, est censé ne pas avoir la nationalité de ce dernier; dès lors, s'il ne possède pas une autre nationalité en vertu des législations applicables, par exemple par le jeu du ius soli, l'article premier lui confère la nationalité de sa mère.
L'opportunité d'une telle disposition a été discutée. On a fait valoir qu'elle créait une fiction d'apatridie peu compatible avec le droit de la nationalité, que la qualité de réfugié, à l'inverse de la nationalité, est souvent précaire étant donné qu'elle repose sur des conceptions politiques et philosophiques parfois bien fragiles des intéressés et qu'enfin elle aboutirait à multiplier les cas de double nationalité.
Il faut cependant reconnaître que la nationalité d'un réfugié est toujours imprécise car il n'est pas possible de la faire établir ou confirmer par ses autorités nationales. D'autre part, si le réfugié possède au point de vue juridique une nationalité déterminée, celle-ci est dépourvue d'un élément considéré comme essentiel, la protection nationale de la personne en cause. C'est du reste la raison pour laquelle les réfugiés sont placés sous une protection internationale, exercée par le Haut Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés, et sont régis quant à leurs droits par la Convention de Genève du 28 juillet 1951, laquelle soumet leur statut personnel non plus à la loi nationale mais à la loi de leur domicile ou de leur résidence. A plusieurs reprises d'ailleurs, les organes compétents des Nations-Unies et du Conseil de l'Europe ont exprimé le vœu qu'en vue de leur permettre d'acquérir la nationalité du pays qui leur donne asile, les réfugiés soient considérés comme des apatrides. Certains pays ont pris des dispositions pratiques dans ce sens. On ne peut certes nier que des réfugiés manifestent de l'instabilité dans leurs convictions et dans leur comportement à l'égard de leur pays d'origine. Il semble toutefois que cette instabilité soit moins fréquente de la part de ceux qui ont la volonté de fonder une famille dans leur pays d'accueil et qui désirent s'y intégrer. Il est vraisemblable qu'une mesure telle que celle que prévoit la Convention constituera un facteur non négligeable de fixation et d'intégration des réfugiés.
L'inconvénient de la double nationalité dans le cas d'un réfugié et de sa famille peut exister notamment lorsqu'il acquiert la nationalité de son pays d'accueil, par naturalisation par exemple. Cette situation semble toutefois n'entraîner que des conséquences peu importantes en pratique, d'autant plus que conformément à la Convention du Conseil de l'Europe sur la réduction des cas de pluralité de nationalité, signée à Strasbourg le 6 mai 1963, plusieurs États permettent à un bipatride de renoncer à leur nationalité
Enfin, il est sans doute préférable d'avoir deux nationalités que de n'en posséder aucune.
L'application de la disposition de l'article 2 est subordonnée à une double condition particulière; il faut que le père soit reconnu comme réfugié par l'État dont la mère possède la nationalité ou tout au moins que la décision lui reconnaissant la qualité de réfugié, intervenue ailleurs, soit admise par cet État et, d'autre part, que le père soit réfugié au moment de la naissance de l'enfant. La définition du terme réfugié figure à l'article premier de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 modifié par le protocole de New York du 31 janvier 1967.
En vue de faciliter l'acceptation de la Convention par des États qui ne seraient pas encore en mesure d'en assurer l'application sans réserve, il a été jugé opportun de leur permettre d'y souscrire en apportant aux principes énoncés aux articles 1 et 2 certains correctifs.
Toutefois, afin de ne pas rendre la Convention totalement inopérante, les réserves permises ne pourront porter que sur les points visés aux paragraphes a), b) et c) de l'article 4.
Il en résulte que, s'il en exprime formellement la volonté, un État contractant pourra n'accorder sa nationalité en application des articles premier et 2 qu'à l'enfant né sur son territoire ou sur celui d'un autre État contractant.
Il a été objecté que cette clause serait une régression par rapport aux tendances du droit moderne qui, vu la liberté du mouvement et la facilité avec laquelle s'effectuent les voyages internationaux, considèrent le lieu où survient une naissance comme souvent fortuit et accidentel, ce qui fait qu'il ne constitue plus un critère sérieux de rattachement pour l'attribution d'une nationalité. Étant donné toutefois que la législation d'autres États ne leur permet pas encore d'attribuer leur nationalité dans les cas visés par la Convention sans tenir le moindre compte du lieu de naissance et que, par conséquent, leur adhésion à la Convention pourrait en dépendre, cette disposition a été insérée de façon facultative et provisoire.
En effet, les États contractants ne sont pas tenus d'y souscrire, et d'autre part, lorsqu'ils l'ont fait, ils peuvent à tout moment y renoncer ce qui aura pour effet d'assurer l'application de la Convention sans aucune restriction d'ordre géographique. Du reste, la portée pratique de cette réserve sera d'autant moins grande que le nombre des États contractants sera élevé.
Les réserves b) et c) portent sur l'application de l'article 2. La première permet de l'écarter purement et simplement tandis que la seconde la restreint aux enfants nés d'un homme que l'État contractant reconnaît lui-même comme réfugié sur son territoire, ce qui suppose que l'État intéressé a pu apprécier lui-même sa situation.
L'article 3 limite l'application des articles précédents aux enfants nés après l'entrée en vigueur de la Convention ou encore mineurs à cette date. Un tel mineur acquerra rétroactivement la nationalité de la mère, mais ceci peut être accepté, puisque malgré la rétroactivité, les actes juridiques accomplis par ou à l'égard de ce mineur sous son statut antérieur demeurent intacts.
Des Conventions internationales ou des règles de droit interne plus favorables à l'attribution à l'enfant de la nationalité de sa mère pourront être appliquées, qu'elles soient déjà en vigueur ou qu'elles soient adoptées à l'avenir.
L'article 5 stipule que la présente Convention ne s'y oppose pas.
Les articles 6-10 comprennent les clauses protocolaires.
En vertu de l'article 9, la Convention est ouverte à l'adhésion de tout État lié par la Convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et le protocole de New York du 31 janvier 1967; il a paru en effet souhaitable de permettre au plus grand nombre possible de pays d'adhérer à cette Convention, vu sa portée sur le plan social et humanitaire.